Dynastie et plantation

L’économie de plantation, celle dans laquelle sont insérés les pays d’Afrique francophone, assure la constitution d’un capital, mais pas la transmission de celui-ci. Par exemple, un haut fonctionnaire va voler les deniers publics et se constituer un capital. Comme il a beaucoup de femmes et beaucoup d’enfants, son capital va être dispersé dans les querelles de succession. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que les nouvelles générations doivent recommencer presque à zéro l’accumulation du capital, et surtout, que les enfants de ce haut fonctionnaire ne sont pas assurés de conserver leur niveau de vie et de le transmettre à leurs propres enfants. Vous comprenez donc qu’avez un pareil système on ne pourra jamais se développer. La mort du père est un moment de grande instabilité en ce sens que la compétition est âpre entre ses héritiers pour capter sa fortune. 


Dans une société basée sur l’économie de plantation, il y a deux types de conflits identifiables : le conflit à l’intérieur de la tribu pour capter l’héritage du père, et le conflit avec les autres tribus pour maîtriser l’état c’est-à-dire la marchandise et les terres. La première


instabilité d’un tel système est endogène, au sein même de la famille, comme je l’ai présenté dans le premier paragraphe. Les conflits de succession entraînent généralement la dispersion du capital. Pourtant, les règles de succession sont bien établies dans les tribus, un fils, souvent l’aîné, héritant du père. Or, on voit que cette règle ancienne, relevant de la tradition, n’empêche pas la survenance de la crise successorale. C’est très important de le garder à l’esprit. 


Le deuxième conflit est bien sûr celui qui oppose les tribus pour la maîtrise de l’état. Là aussi, on observe depuis 2005 au Togo l’institution du principe dynastique dans la transmission du pouvoir. La règle, qui jusqu’ici n’était valable qu’à l’intérieur de la tribu, s’étend désormais à toute la nation. D’autres pays d’Afrique francophone se sont inspirés du Togo comme le Gabon et le Tchad. En Guinée Équatoriale, au Congo et au Cameroun, la même voie est empruntée. Or, comme on l’a vu à l’intérieur des tribus, le principe dynastique n’abolira pas la compétition entre les tribus et ne sera jamais un vecteur de stabilité. De plus, il ne permettra jamais, en raison du boom démographique que connaissent tous ces pays, la constitution et la reproduction d’une bourgeoisie comme nous le montrent les conflits à l’intérieur des tribus. En gros, le capital se baladera de mains en mains à l’intérieur de la tribu au pouvoir. Un tel système, comme on peut le voir à sa manière de disperser le capital, ne permettra jamais à un pays de sortir de la pauvreté. Bien au contraire.

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